La vessie

L’urine n’est pas hygiénique?

Un urologue répond à cette question et à huit autres sur la vessie.

Il est difficile d’oublier que l’on a une vessie. Elle se fait remarquer plusieurs fois par jour parce qu’elle souhaite être vidée. Mais on ne sait pas grand-chose sur cet organe. Nous avons interrogé un urologue.

Dr med. Marko Kozomara-Hocke*, est-il exact que les femmes se rendent plus souvent aux toilettes que les hommes? 

Non, en l’absence de problèmes ou de troubles de santé, les conditions sont les mêmes pour les deux sexes. Cela signifie que les deux vessies ont normalement la même capacité et peuvent contenir le même nombre de litres.

Pourquoi a-t-on besoin de faire pipi quand on est nerveux?

Le besoin d’uriner en cas de nervosité est le fait du système nerveux végétatif. Quand il est stressé ou irrité, comme en cas de nervosité, de peur ou de froid, le seuil d’excitabilité s’abaisse et on a vite l’impression d’avoir besoin d’uriner. Dès que l’on se détend à nouveau, la pression disparaît généralement. Idem si l’on porte son attention sur autre chose. Mais si l’on doit vraiment uriner de toute urgence, par exemple avant d’entamer une compétition sportive, il faudrait si possible encore le faire.

Pourquoi les femmes sont-elles plus sujettes aux cystites que les hommes?

C’est en lien avec la longueur de l’urètre. Il est un peu plus court chez la femme, et donc la distance entre l’extérieur et la vessie est plus petite que chez l’homme. Les bactéries peuvent donc pénétrer plus facilement et plus rapidement. L’urètre féminin est aussi plus sensible aux irritations, notamment lors de rapports sexuels ou en cas d’exposition au froid. Les autres facteurs de risques concernant les infections des voies urinaires sont l’activité sexuelle, la ménopause ou l’utilisation d’un diaphragme. Mais les bactéries, en elles-mêmes, ne sont pas forcément mauvaises pour la vessie. Si le besoin d’uriner est constant, en cas de sensations de brûlure à la miction, de passages fréquents aux toilettes ou de douleurs, il faudrait consulter un spécialiste.

Peut-on faire quelque chose de bien pour la vessie ou même l’entraîner?

Oui et non. On peut l’entraîner, mais on ne peut pas lui faire du bien en prévention – il n’y a en tout cas rien de scientifiquement prouvé. On peut par exemple l’entraîner avec un physiothérapeute, en renforçant le plancher pelvien, par des exercices de respiration ciblés, certaines positions assises ou simplement en essayant de prolonger les laps de temps entre deux mictions. Mais il ne faudrait pas le faire dans un esprit de compétition, sinon, on risque ce que d’aucuns appellent la vessie du chauffeur. En effet, chez les chauffeurs de camion ou les employés de kiosque, qui doivent constamment réprimer leur envie d’uriner, la vessie finit par se dilater et les muscles qui servent à expulser l’urine s’affaiblissent. Conséquence, la vessie ne peut plus se vider entièrement.

L’urine est-elle non hygénique?

En principe, non. Il y a d’ailleurs des gens qui boivent leur propre urine matinale pour renforcer leur système immunitaire. Je le déconseille toutefois. Car si l’urine n’est pas sale et ne contient pas non plus des bactéries mortelles, elle ne contient pas non plus de valeurs nutritives. En effet, via l’urine, nous éliminons des résidus hors du corps, autrement dit, des choses dont l’organisme n’a plus besoin.

La couleur de l’urine donne-t-elle des indications sur notre santé?

Pas vraiment. Le matin, elle est généralement foncée, car plus concentrée. Quand on mange des betteraves, elle devient rouge, certains médicaments peuvent aussi la rendre orange et elle est très claire quand on boit beaucoup pendant la journée et qu’on fait régulièrement pipi. Ce n’est qu’en présence de sang dans l’urine qu’il faut impérativement consulter un médecin pour clarifier la situation.

Pourquoi le jet est-il très bref chez certains alors qu’il semble durer une éternité chez d’autres personnes?

Cela dépend souvent du contrôle, respectivement de la décontraction du plancher pelvien. Les personnes qui arrivent bien à le contracter et à le détendre peuvent attendre plus longtemps avant d’uriner et leur jet sera forcément plus puissant. Les personnes qui ont vécu une grave injustice ou un tournant crucial dans leur vie durant l’enfance ont souvent des difficultés à uriner normalement à l’âge adulte. De tels événements peuvent en effet provoquer des contractures au niveau du plancher pelvien. Les personnes concernées se sont habituées à la situation au fil des ans. Et il n’est vraiment pas simple de lâcher prise par la suite. Mais un médecin spécialisé ou l’entraînement du plancher pelvien chez un physiothérapeute peuvent aussi aider dans ce cas.

Comment la vessie évolue-t-elle au fil des ans?

Les premiers changements apparaissent souvent dès 30 ans chez la femme, fréquemment en raison d’une grossesse. On parle alors d’incontinence d’effort, autrement dit, de pertes urinaires involontaires quand on rit, tousse ou éternue. Chez l’homme, les changements surviennent plutôt à partir de 50 ans, quand il y a aussi des changements au niveau de la prostate. Le besoin d’uriner peut par exemple augmenter: on a plus vite et plus souvent l’impression de devoir aller aux WC car la prostate presse sur la vessie. Vers 80 ans, les deux sexes sont à égalité et au moins 40 % des seniors sont confrontés à des besoins pressants et des problèmes d’incontinence urinaire.

Que se passe-t-il exactement en cas d’incontinence urinaire?

Il y a dysfonctionnement ou affaiblissement du sphincter situé sous la vessie – en conséquence, l’urine ne peut plus être entièrement retenue en cas d’effort. On parle donc d’incontinence d’effort. En cas d’incontinence par impériosité, c’est la vessie que l’on ne peut plus contrôler. Elle se contracte tellement que l’on perd de l’urine malgré la puissance du sphincter. On peut agir dans les deux cas, que ce soit avec des médicaments, des implants, l’entraînement du plancher pelvien ou la stimulation électrique. L’important, c’est de parler de ces problèmes et de recourir à une aide professionnelle. Car si l’on se gêne d’en parler, l’incontinence peut sérieusement péjorer la qualité de vie et conduire à l’isolement.

* Le Dr med. Marko Kozomara-Hocke est urologue à l’Hôpital universitaire de Zurich

Auteure: Denise Muchenberbger
Traduction: Claudia Spätig
Rédaction: Marie-Noëlle Hofmann
Contrôle scientifique: Elisabeth von Grünigen-Huber, droguiste ES et responsable du département Politique et branche à l’Association suisse des droguistes
Sources
  • Tribune du droguiste

  • Dr med. Marko Kozomara-Hocke, urologue à l’Hôpital universitaire de Zurich