Pollution sonore: on ne s’y fait pas

Certaines personnes peuvent parfaitement dormir à côté d’une voie de chemin de fer. «On s’y habitue», affirment-elles. Peut-être… mais uniquement en apparence!

Nos oreilles ne s’endorment jamais, elles entendent tout. De même, notre cerveau reste actif pendant la nuit et réagit aux sons. Voilà qui explique pourquoi la pollution sonore nocturne nuit à la santé, même si l’on ne s’en rend pas compte.

  • Les nerfs réagissent au bruit. Ce n’est qu’après une exposition à des nuisances sonores très fortes que l’ouïe peut être endommagée. Il n’en va pas de même avec les nerfs qui réagissent même aux sons les plus infimes. Le bruit nous met en état d’alerte, prépare le corps à la fuite. Lorsqu’on est couché dans son lit et qu’un camion passe en trombe devant la maison, on n’est certes pas obligé de prendre la fuite, mais le corps enregistre malgré tout un signal d’alarme. Plongé dans l’incertitude, il maintient un état d’alerte inutile. Il sécrète des hormones du stress, comme l’adrénaline, la noradrénaline et le cortisol. Notre vigilance est accrue, la pression artérielle et la fréquence cardiaque augmentent.

  • Durant la journée, le bruit distrait et perturbe la concentration. La nuit, il trouble la phase d’endormissement, provoque des réveils fréquents et réduit la durée des phases de sommeil profond. Dormir n’est pas un luxe, c’est vital. Les personnes qui dorment mal pendant une longue période en paient le prix fort: fatigue chronique, irritabilité accrue et baisse des performances.

  • La pollution sonore est un bruit gênant qui perturbe, qu’on veuille ou non le percevoir. Le bruit oblige le cerveau à procéder à des filtrages fastidieux qui nécessitent beaucoup d’énergie. Pour dormir ou travailler dans un environnement bruyant, il faut apprendre à reconnaître quels bruits sont importants (la sonnerie du réveille-matin) et lesquels ne le sont pas (vrombissement d’un camion). A force de devoir ainsi évaluer et filtrer les sons, l’inconscient n’a plus la possibilité de faire des pauses pour souffler.

  • Le bruit agit toujours comme un stimulus de réveil, mais il est perçu différemment en fonction de sa provenance. L’effet gênant du bruit n’augmente pas proportionnellement à son intensité mesurable. Ainsi, un groupe de jeunes criant dans la rue peut parfois passer presque inaperçu alors qu’une mère s’éveillera au moindre babillement de son bébé.

  • Le bruit n’est pas seulement une source directe de problèmes. La pollution sonore au travail ou durant les activités de loisirs peut aussi avoir, à terme, des effets négatifs sur le système nerveux végétatif. Ainsi, les nuisances sonores diurnes peuvent également être à l’origine de troubles du sommeil.

Que faire contre la pollution sonore?

  • Installer la chambre à coucher du côté calme du logement (à l’opposé de la rue).

  • Mettre des rideaux ou des tapis qui «absorbent» le bruit.

  • Poser des isolants phoniques (cloisons) sur les murs.

  • L’isolation sonore des fenêtres est une autre option, mais elle risque de nuire à la qualité de l’air intérieur. L’Université technique de Vienne a pu démontrer que le taux de substances chimiques toxiques est plus élevé dans les chambres dotées de fenêtres d’isolation modernes. Ces fenêtres isolantes empêchent en effet les échanges d’air entre l’intérieur et l’extérieur.

  • Porter des boules Quies ou d’autres bouchons acoustiques peut, à court terme, atténuer les problèmes d’insomnie.

  • Ecouter du «bruit blanc» peut aussi soulager certaines victimes de la pollution sonore nocturne. Un bruit blanc est composé de toutes les fréquences perceptibles par l’oreille humaine (de 16 Hz à 20 kHz). Toutes les fréquences y ont la même amplitude, autrement dit la même intensité sonore. L’ouïe perçoit ce bruit comme un souffle ou un chuintement. Les sons produits par les sèche-cheveux ou les ventilateurs sont de bons exemples de bruits blancs. Idem pour le léger grésillement d’une radio mal réglée.

Si l’on est exposé qu’occasionnellement à des nuisances sonores durant notre sommeil, mieux vaut suivre le conseil de Jürg Schwander, médecin spécialiste du sommeil de Zurzach (AG): «La règle n°1, c’est de ne pas s’énerver.» Parce que si l’on s’énerve, on commence à stresser et alors là, on peut définitivement dire adieu au sommeil!

Les défenses du corps contre le stress

Même si l’on ne peut pas s’habituer au bruit, le corps réussit quand même à développer, dans une certaine mesure, une ligne de défense contre le stress lié à la pollution sonore. Les scientifiques de l’Institut de psychiatrie Max Planck à Munich ont découvert que le cerveau est capable de se défendre contre le bruit. Explication: lorsque l’ouïe d’une personne endormie enregistre des stimuli qui diffèrent un peu de l’environnement sonore habituel, il se passe deux choses. D’abord, la réaction normale de l’oreille est «désactivée», comme si elle n’entendait rien. Parallèlement, certaines zones du cerveau sont stimulées. Les chercheurs supposent qu’il s’agit là d’un mécanisme de protection, pour éviter les réveils trop fréquents. Un mécanisme qui émousserait pour ainsi dire nos antennes auditives. Mais cela ne fonctionne que lorsque les stimuli varient légèrement de l’environnement sonore habituel: lorsque le réveille-matin sonne, on se réveille immédiatement.

Les principales victimes du bruit

Certains groupes de personnes sont plus vulnérables au bruit. Comme les enfants dorment plus longtemps que les adultes, ils sont plus exposés au bruit nocturne. Les personnes souffrant de maladies chroniques et les seniors sont aussi plus sensibles aux perturbations. Les personnes qui travaillent en équipes courent un risque accru car la structure de leur sommeil est dérangée durant la journée – ce qui augmente leur sensibilité aux bruits. En outre, les personnes moins riches, qui ne peuvent se permettre de vivre dans des zones résidentielles calmes ou d’avoir des maisons bien isolées, souffrent beaucoup plus. «Si les pouvoirs publics négligent de s’attaquer à la pollution sonore, le fossé entre riches et pauvres se creusera certainement», prévient l’OMS.

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Auteure et rédaction: Katharina Rederer
Traduction: Claudia Spätig
Sources
  • OMS - Night Noise Guidelines for Europe (www. Euro.who.int), 2009

  • ddeutsche.de

  • wissen aktuell Radio DRS2 juin 2012

  • Direction des travaux publiques du canton de Zurich

  • artikelmagazin.com