Envoi par correspondance de médicaments en Suisse

Aujourd’hui, on peut pratiquement tout commander sur internet. Mais pas les médicaments: l’envoi par correspondance de médicaments en Suisse est pratiquement interdit. Seules quelques pharmacies ont une dérogation et envoient des médicaments – aussi en vente libre – mais seulement contre une ordonnance médicale.

Pour l’heure, il est uniquement possible de commander ses médicaments en vente libre sur internet avant d’aller les chercher dans une droguerie ou une pharmacie. Les magasins en ligne proposent en outre des produits en vente libre comme certaines tisanes, des compléments alimentaires, des produits cosmétiques, des dispositifs médicaux et des produits de soin. La loi permet aussi, dans des cas exceptionnels, l’envoi ultérieur de médicaments. Ça veut dire, par exemple, que si un médicament n’est pas en stock quand le client est dans le magasin, les drogueries et les pharmacies peuvent alors le lui envoyer.

Des biens particuliers

Ces règles ont de bonnes raisons. Elisabeth von Grünigen-Huber, responsable du département Politique et branche à l’Association suisse des droguistes: «Les médicaments sont des biens particuliers. Avant la prise, il faut une clarification professionnelle des troubles et un conseil spécialisé. Le patient doit être informé du bon dosage et on doit vérifier que le produit est bien adapté.» Les lois font en sorte que le commerce en ligne de médicaments ne menace pas la sécurité des patients.

L’exemple des Etats-Unis montre qu’il faut des règles dans le domaine de la santé, précise Elisabeth von Grünigen. «Là-bas, on peut acheter de nombreux médicaments dans les supermarchés ou les commander sur internet. Beaucoup de gens avalent ainsi involontairement le mauvais médicament ou à une dose trop forte ou trop faible.» Le personnel des drogueries est bien formé et peut conseiller à un client de consulter son médecin si nécessaire.

La pertinence du commerce en ligne

Le commerce en ligne de médicaments est pratique dans les régions isolées de Suisse où il n’y a ni droguerie, ni pharmacie ou pour les personnes âgées ou moins mobiles, ajoute Elisabeth von Grünigen-Huber. «Mon grand-père âgé de plus de 90 ans qui souffrait de problèmes cardiaques devait faire au moins une demi-heure de bus postal pour trouver une pharmacie. Pour lui, c’était idéal de pouvoir commander ses médicaments. Comme il souffrait d’une maladie chronique, la livraison était planifiable et le délai d’envoi ne posait pas de problème.»

Mais pour les troubles aigus comme les diarrhées, les maux de tête ou la toux, Elisabeth von Grünigen-Huber, tout comme le Dr Marcel Mesnil, secrétaire général de pharmaSuisse, la Société suisse des pharmaciens, doutent de la pertinence de la vente par correspondance: «Dans ce cas, on a besoin d’une solution immédiate et on ne peut pas attendre le facteur pendant quelques jours.» Les produits en ligne arrivent trop tard dans ce cas. «Il est aujourd’hui tout à fait normal de s’informer sur internet et même d’y faire ses achats. En pharmacie, nous constatons cependant qu’un entretien de conseil ne peut pas être remplacé par le Dr Google. Nos clients apprécient un conseil professionnel et une aide rapide et sûre», estime Marcel Mesnil.

Entretien de conseil indispensable

Les associations faîtières du commerce spécialisé discutent de solutions pour pouvoir vendre des médicaments en ligne de manière simple dans le futur. Des solutions qui remplaceraient le passage chez un médecin pour une ordonnance tout en garantissant la sécurité des patients. «Il faudrait qu’il y ait, à l’avenir aussi, un contact entre un spécialiste agréé, comme un pharmacien par exemple, et le patient avant l’envoi d’un médicament et le patient devra pouvoir être identifié», explique Marcel Mesnil. Elisabeth von Grünigen-Huber trouve en outre important que les médicaments ne puissent être envoyés que par des distributeurs bénéficiant d’une autorisation reconnue.

Les patients devront cependant attendre encore un peu avant de pouvoir commander des médicaments en ligne de manière plus simple. Rien de concret n’est encore prévu. Grâce à la révision de la loi sur les produits thérapeutiques entrée en vigueur début 2019, l’accès à des centaines de médicaments est au moins déjà considérablement facilité.